rock bottom.

Davis a passé toute son enfance et le début de son adolescence à Guernsey
C’était un enfant très souriant, qui ne faisait pas de vague, il faisait partie d’un petit groupe d’amis qui passait son temps à taper dans un ballon, du matin au soir dès lors qu’ils n’étaient pas en classe. D’aussi loin qu’il s’en souvienne, le football a toujours été la passion de Davis. A un point presque obsessionnel, il n’avait que ça à la bouche, ne se souciait guère d’autre chose. Ses résultats à l’école étaient relativement bons uniquement parce qu’il était menacé d’être privé de foot si jamais sa moyenne chutait jusqu’à un certain point.
A quatorze ans, il a quitté le cocon familial pour se rendre tout au nord de l’Angleterre, à Liverpool. Là-bas, il avait été recruté pour rejoindre le centre de formation d’Everton, l’autre club de Liverpool, le rival. Une semi-indépendance prise bien trop tôt qui l’a poussé à faire de nombreux mauvais choix dans son chemin de transition d’adolescent vers l’homme. Si le footballeur progressait à vitesse grand V et faisait partie des plus grands espoirs du centre, l’homme qu’il devenait lui, ne se démarquait pas par un excès de qualité.
Rapidement, Davis s’est habitué à ce que tout lui soit dû, à ne plus avoir à faire d’efforts pour obtenir quelque chose en dehors du foot et cette tendance n’a fait que s’accélérer lorsqu’il a effectué ses débuts professionnels à l’âge de 20 ans. Tout à coup, tout arrivait trop vite. Un nouveau contrat qui lui offrait plus d’argent qu’il n’était capable de gérer, des fans qui boostaient un égo qui n’avait pas besoin d’être davantage encouragé, un entourage malsain qui se constituait petit à petit. Trop naïf, il fût incapable de repérer ceux qui s’intéressaient à lui uniquement pour obtenir une part du gâteau, ceux qui n’avaient pas ses meilleurs intérêts à coeur. Mais tant bien que mal, son ascension semblait se poursuivre. Il profitait de son argent, de sa notoriété pour enchaîner les relations sans lendemain. Là encore, il ne faisait pas le moindre effort, s’en tirait sans problème avec des remarques abjectes et un comportement machiste qu’on ne lui reprochait jamais.
Mais à 24 ans, alors qu’il était sur le point de négocier un nouveau contrat lucratif, une blessure vint le couper net dans son élan : fracture de la malléole droite suite à un tacle trop appuyé. Des mois de rééducation pris à la légère couplés à une hygiène de vie douteuse le plongeront dans un cycle sans fin de blessures à cette même cheville. Des rechutes à gogo, des manques de cartilage hyalin et malgré les retours sur le terrain éphémères, il sera déclaré deux ans plus tard, inapte à la pratique du sport à haut niveau. Sa cheville ne pourra jamais se remettre à 100% de sa blessure, jamais elle ne pourrait retrouver toute l’élasticité nécessaire, jamais elle ne pourrait être suffisamment solide pour résister aux différents appuis et chocs. Un choc, le mot est d’ailleurs faible pour décrire ce qu’il se passe dans la tête de Davis. C’est toute son existence qui est remise en question. Il n’a jamais su être rien d’autre qu’un footballeur, c’était ce pourquoi il s’était entraîné depuis qu’il était gamin et du jour au lendemain, il allait devoir se réinventer, comme ça, en un claquement de doigts. La personne qu’il était devenue depuis une dizaine d’années allait elle aussi devoir évoluer.
La tête basse, il décida de rentrer à Guernsey. C’était il y a presque deux ans et la réadaptation a été particulièrement compliquée. Ici, seuls les enfants qu’il entraîne se soucie de son statut d’ancien footballeur professionnel. Les autres personnes n’en ont que faire, il n’est plus qu’un homme parmi tant d’autres et si son sourire et sa belle gueule font souvent bonne impression, sa mentalité et son égo font rapidement fuir les quelques femmes qu’il a rencontré depuis son retour. Difficilement, il commence à se rendre compte de la personne qu’il était devenue ces dernières années et a du mal à l’accepter. Il essaie tant bien que mal de changer, d’être moins superficiel, de devenir ce que certains appellent un homme meilleur mais la transition n’est pas évident, ses mauvaises habitudes sont bien ancrées et malgré tous ses efforts, il n’est pas rare qu’un mauvais réflexe vienne prendre le dessus au fil d’une conversation.