sinner's syndrom (irina)

Jolene est assise sur un banc qui borde un bout de ponton. Ses yeux dissèquent le vague de l'océan qui rougeoie à l'approche de la fin de journée. Elle devrait rentrer. Récupérer les enfants sur le passage. Peut-être au moins ramener un truc sympa à manger, et même tenter de passer une soirée en famille. Au lieu de quoi, la voila encore échappée du foyer, à chasser elle ne sait trop quelle liberté de manière parfaitement vaine.

Au lieu de quoi, la voila encore entrain de fauter.
Entrain d'attendre une autre femme que la sienne. Irina.

La rousse lui surine le crâne depuis quelques jours. Leur récent baiser reste gravé dans sa peau comme on la marquerait au fer rouge. Et Jolene s'en veut. Pas tant pour le baiser en lui-même que pour leur amitié teintée. C'est qu'elle n'a pas énormément d'amis, et que de surcroît, celle d'Irina lui est à peu près et, sans qu'elle ne s'explique pourquoi, plus chère que les autres.

Si elle s'en veut autant, c'est aussi parce que ça lui a fait du bien, là, dans un carré de son cœur nécrosé. Ca lui a fait vraiment beaucoup de bien. C'était court. C'était bref. Peut-être une seconde. Et puis le visage de George est venu lui parasiter tous les sens. Irina s'est excusée. Jolene s'est excusée. Elles se sont excusées. Et elles n'en ont pas reparlé. Elles ne se sont pas revues.

Pas avant aujourd'hui.

En toute honnêteté ? Une partie d'elle espère qu'Irina ne viendra pas et lui posera le pire des lapins. Jolene n'a jamais été douée pour parler, pour expliquer ou tirer au clair. Ni pour écouter. Ni pour s'excuser. Et elle l'a déjà fait une fois. Une chose est au moins limpide : elle aime George. Mais Irina... Quelque chose palpite dans le fatras d'affects et de sentiments. Elle ne sait pas quoi. Ou ne veut pas savoir.

Jolene débloque son téléphone et se met à consulter nerveusement sa messagerie. Ca s'étire une poignée de minutes. Une poignée de minutes qui laisse une multitude de doutes fermenter entre les intestins.

Quand la silhouette d'Irina découpe l'horizon dans le coin d'œil, Lee la gratifie d'un signe de la main et d'un sourire plus pur qu'il ne l'a jamais été, ces derniers temps.

« Hey ! »

C'est toute l'éloquence qu'elle arrive à déloger de sa gorge curieusement sèche.