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 (HOT) RELIA » SEULS ET VAINCUS.

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L’odeur montait jusqu’à ses narines et s’il y a quelques mois, elle se serait penché afin de vider le contenu de son estomac, elle s’y était habituée. À l’émanation des poissons crevés, à l'odeur de sel remué, aux semelles collant sur un sol sale et à ce rythme lent, ennuyant. Elle prenait sur elle, l’étoile éteinte. Pour ne pas s’enfuir, courir jusqu’à s’en rompre les jambes, subissant l’explosion d’un palpitant épuisé, lessivé depuis trop longtemps. Rosa, elle tentait de s’accrocher, même si chaque morceau saisit, s’effritait entre ses phalanges. Écorchant son épiderme cramé au soleil, s’enfonçant dans sa chair. Tentative vaine de s’échapper, de s’extirper d’une réalité déboussolante. Elle peinait à respirer, les poumons obstrués, comprimés, par une force inconnue. Le malheur intact depuis cette perte soudaine, à laquelle elle ne s’était pas préparée, pas même dans ses songes les plus dingues. Rosa, elle ne savait plus quoi faire de ce qui se passait dans son existence, incapable de redorer son nom et de se battre pour son titre, envolé. Impératrice de pacotille. Danseuse misérable. Tout s’était envolé, en même temps que l’ultime souffle de vie des géniteurs. Un au revoir sous forme d’adieu. Un adieu en guise d’ultime révérence. Laissant l’enfant tyrannique sur la touche : sûrement, l’avaient-ils imaginé en train de hurler, à s’en défoncer les cordes vocales, en train de menacer n’importe qui pour tenter de les faire revenir à la vie. Mais l’on ne revenait pas de la mort et ceci, elle l’avait bien compris, Rosa, si longtemps bercée dans des songes illusoires. Les mains paralysées, figées dans une existence vouée à l’échec. Une descente aux Enfers, sans fin. Couloir embrumé sans issues. Juste… Une longue avenue, où chaque pas se coinçait dans un piège. Elle n’en sortirait jamais, certainement pas indemne, la gamine cabossée. Blessée, au plus profond de son essence. Tentant de se relever, même si les pieds étaient cloués au sol, qu’il n’y avait plus que ses larmes pour apaiser le brasier de son âme. Rosa : elle ne se donnait pas plus d’une année. Consciente qu’elle finirait, tôt ou tard, par s’ôter la vie, crevant ainsi dans une vie de misère, de désolation. La Reine ne méritait pas une telle fin, mais il lui était impossible de dénicher des étincelles positives. Enfoncée, jusqu’à la racine des cheveux. Les prunelles absentes, se posant sur les clients, agissant machinalement, dénuée de cette flamme existentielle. Et toujours les mêmes habitudes : celles de frotter jusqu’à l’irritation sa peau, dans le fond du marche. Essayant de gommer ces odeurs infâmes, ruisselant le long de ses galbes délicats. Le corps d’une ballerine se fondant dans les vapeurs, se vêtant de ses plus belles étoffes, en prenant soin d’enfouir sa tenue, au plus profond du sac. Entre deux murs. Pourvu qu’elle ne ressorte jamais. Pourvu qu’elle s’éveille, de ce cauchemar. De cette terreur, qui durait trop. De ces larmes qui bousillaient l’épiderme scintillant. Jurant avec l’apparence irréprochable de la fausse richesse, déambulant dans les ruelles inanimées de la ville perdue. Elle en soupirait longuement, la belle, l’ouïe captivée par le tintement de ses talons aiguilles, martelant le bitume. Prunelles rivées sur l’horizon, sans cesser de repenser à sa vie d’avant. Les mains rendues moites par l’angoisse qui montait et tout ce superficiel, ce paraître, qui l’étouffait. Sauf que la jolie, elle était incapable d’assumer, dire de vive voix, qu’elle n’était qu’une ratée. Une gamine pourrie-gâtée, manquant de ressources pour survivre et s’en sortir. Qui sentait le poisson mort. Sûrement, finirait-elle mal, dans une chambre moisie. Les pas, eux, trouvaient naturellement, une de ces rues, devenues lieu de rencontre, scène des seuls et vaincus. Une entrevue programmée, plus tôt. Sans laisser le choix. La semelle venait donc heurter le tibia, en guise de salutation : jamais délicate, la rose épineuse. Une blessure au milieu d’autres. Sa gueule impassible et sa petite tête brune qui s’imposait : c’était qu’elle en jetait, la danseuse, au milieu de cette crasse, devenue usuelle. « T’as quoi pour moi ? » La voix portait à peine, suffisait à déchirer le ciel étoilé. Ses prunelles, noisette, rivées dans celles qui se tournaient vers elle. La semelle côtoyant à nouveau le sol. « J’ai failli te louper. » Qu’elle commentait en désignant les poubelles de son regard dédaigneux, le jumelant avec les déchets inutiles et nauséabondes, se situant à quelques pas d’eux. Cette putain de risette condescendante aux lèvres. Rosalia : inquisitrice des temps modernes, les bras croisés sur la poitrine couverte, se vouant un peu plus dans la débauche, en restant digne. Jouant des apparences, pour ne jamais s’avouer vaincu. Embelissant son image aux yeux du monde.
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À l'approche du printemps, la durée du jour s'accroissait progressivement. Chaque minute gagnée ravivait un peu les cœurs abattus par le long hiver et sa morosité. Mais ce soir là, le loup de la nuit sauta à la gorge du jour déclinant pour la lui arracher. Des nuages sombres s'étaient amoncelés au dessus de Guernesey en fin d'après-midi, obscurcissant le ciel de bonne heure. L'atmosphère était lourde, chargée d'une humidité qui rendait les perspectives floues. Plus tard, comme on pouvait s'y attendre, il se mit à pleuvoir. Au début, ce ne fut qu'une petite bruine relativement inoffensive, mais au bout d'une demi heure, une averse violente et froide commença à marteler, comme le feraient des doigts furieux sur une surface creuse, les toitures. Le grain se dissipa néanmoins après un moment, laissant derrière lui un ciel totalement noir. Tout était détrempé. Le froid pénétrait jusqu'à l'os avec d'autant plus d'acharnement que l'air était saturé d'eau. C'était là l'un des maléfices de l'île. Elle rappelait à tout instant son caractère sauvage, indocile, à ses habitants. Bout de roche balayé par les vents salés.

Remy regarda Rosalia approcher d'un regard en biais. Cela faisait quelques minutes qu'il l'attendait, debout sur le bord de la route, la voiture garée sur le côté, à bonne distance des quelques maisons miteuses qui constituaient le quartier de résidence de la belle. Il fumait une cigarette pour se donner de la contenance, les mains dans les poches et le corps tendu sous l'effet du froid.
Lorsqu'elle lui adressa un coup de pied dans le tibia, il acheva néanmoins tout à fait de tourner la tête dans sa direction. Comme à son habitude, la jeune femme remplaça les salutations par une plaisanterie acerbe. L'homme esquissa à peine un rictus, préférant tirer sur sa cigarette plutôt que de répondre tout de suite. Il la toisa brièvement, de ce regard sinistre et pesant qu'il avait, avant de se résoudre à jeter son mégot d'une pichenette et ouvrir la bouche.

« Peut-être bien que tu devrais passer ta soirée là bas. Dit-il. Elles supporteront probablement mieux ta conversation que moi.

Remy expulsa ce qui lui restait de fumée dans les poumons à travers une longue expiration. À peine eut-il prononcé ces mots qu'il les regretta, car il savait Rosalia plus maligne et cassante qu'il ne le serait (sans doute) jamais. Il s'attendait à une réplique. La jeune femme brillait dès qu'il s'agissait de fouler au pied tout ce qui tentait de l'approcher, de près ou de loin.
Pourtant, en dépit de leur aspect foncièrement délétère, teinté de mépris, de dédain et de condescendance, Remy s'était habitué à leurs rencontres occasionnelles. Elles éveillaient chez lui une foule de sentiments et d'émotions contradictoires.
En effet, la princesse s'appliquait à se rendre haïssable avec beaucoup de succès, mais c'était sans compter sur sa beauté à couper le souffle. L'homme n'avait d'autre choix que de transformer le désir cru et impérieux qu'il ressentait pour elle en répugnance à peine dissimulée. Il la détestait car elle se plaçait hors d'atteinte, à la manière du renard aux raisins de la fable. C'était aussi simple que cela : de la médiocrité ordinaire.
Bien sûr, Rosalia était parfaitement consciente des privilèges que lui octroyaient son joli minois et en jouait. Cela rendait Remy doublement furieux. Pourtant, il continuait à la voir et dénier sa propre bêtise. Faiblesse toute masculine dont il n'avait aucune idée. Un envoûtement sans doute aussi vieux que le monde.

« Allez, amène toi.

Dit-il, comme s'il lui faisait une faveur. Ils allèrent s'asseoir dans la voiture, encore tiède d'avoir roulé un peu. Remy sorti alors un pochon de marijuana de la boite à gant. Il s'était rendu à Liverpool il y a quelques jours de cela et en avait profité pour rencontrer d'anciennes connaissances.
Les quelques minutes qui suivirent se déroulèrent en silence, tandis que l'homme broyait et préparait le cannabis. Il sentait une tension sourde monter en lui, accentuée par la présence de Rosalia à son côté. Le grincement du briquet intervint néanmoins au bon moment, libérateur. Remy s'octroya le privilège de la première bouffée. Il avala habilement le nuage de fumée laiteuse qui tentait de s'échapper de sa bouche et ne le recracha qu'après en avoir longuement imprégné ses poumons. Une sensation d'engourdissement douceâtre ne tarda pas à enfler lentement depuis sa poitrine jusqu'au fond de sa gorge, ramenant le jeune homme à un état de détente agréable.
Puis, il tendit le joint à Rosalia d'un geste nonchalant, sans la regarder, ses prunelles bleues perdues dans l'obscurité épaisse de la nuit.
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Rosa, elle errait dans ces ruelles. Parcourues bien trop souvent, à la recherche d’un brin de folie. D’une nouveauté capable de l’exalter, de l’enivrer, lorsque la danse et la fortune ne le faisaient plus. Sur le chemin de la débauche, Rosa. Sans retour possible, maintenant que ses pas la menaient vers un peu plus de débauche. Des trucs qu’elle n’aurait jamais fait, si les parents étaient encore de ce monde. Ils n’en étaient plus et cela l’aidait, d’une part, à justifier son comportement, ses choix de vie, même si l’un était inné, acquis à la naissance, suite à une éducation plus ou moins médiocre. En résultait une gamine défectueuse aux mœurs discutables. Écrasant depuis ses premiers cris, l’univers sous ses semelles cramoisies. Rosalia, elle était défaillante : trop protégée, trop gâtée, trop idolâtrée, rien ni personne ne l’avait stoppé dans sa progression vers la mesquinerie. Fallait bien du cran pour empêcher cette poupée délicieuse d’être affreuse et odieuse, parce qu’elle ne reculait devant rien. Aucun obstacle ne lui semblait insurmontable, excepté celui du désespoir face auquel elle se tenait, plus ou moins droite. L’enveloppe déterminée, prête à en découdre. La joute éternelle face à cette gueule succulente, à ces traits aiguisés, capables d’en rendre fou plus d’un. Un jour, toutes les illusions s’en iraient et le monde réaliserait à quel point, il avait été dupé, par la plus illustre des comédiennes. Manipulatrice aux ficelles enroulées autour de ses phalanges. Marionnettiste renommée, dont la célébrité faisait pâlir les anges. Rosalia, elle n’était qu’une escroc, parmi tant d’autres. Une mauvaise graine au sein d’une armée de pourrie. Sa seule différence était qu’elle complexait sur son rang de déchue, la diablesse. Restait digne et menteuse, au lieu d’exhiber son échec. Plutôt crever que d’assumer n’être qu’un désastre. Se bercer de mensonges, pour rendre encore plus fâcheuse la perte. Telle était sa situation, lorsque son corps s’effondrait dans un lit à ressort, rendant douloureuses ses vertèbres. Blessant l’épiderme divin qu’elle bénissait. Rosa : elle ne s’assumait pas, même face au fait accompli. Ancrée sur ses positions, elle ne desserrait pas les dents. Hargneuse. Haineuse. Encore plus face à Remy, le détenteur de ses heures de paradis. Ces instants octroyés parmi les anges, le ciel éclairci. Le corps aérien, le corps cotonneux. Se défoncer et hurler lorsque les effets s’estompaient. Se damner, un peu plus, à chaque bouffée, la mort au bout des lèvres. Le besoin de fourrer ce cône euphorique à ses pulpes charnues et de se griller les poumons, ruinant sa santé si précieuse, d’ancienne danseuse étoile. Fallait-il que l’étoile soit morte, ce soir. Grognant face à l’énoncé de sa décrépitude. Acrimonieuse. « Tout doux l'animal. Je t'ai pas dit d'attaquer. » Y’avait l’injure et le pic facile face à la gueule du raté, prenant plaisir à dominer celui qui avait également échoué, le zéro, le nul, s’assemblant si bien à son propre reflet fissuré, noirci de cendres et de crasse. « Wouaf. » Qu’elle glissait, avec son air insolent, se penchant légèrement vers lui, les bras croisés. Rictus narquois. Des claques se perdaient, qu’on disait. Rosa, énervante, avec son expression supérieure, comme si rien ne pouvait l’atteindre. Le monde à ses pieds, qu’elle se plaisait à penser. La frêle carrure ne tardait pas à le suivre, appelée par la marchandise promise. La désirée. L’étoile plus brillante que les autres. Et sa croupe s’aplatissait dans le véhicule, veillant à disposer élégamment ses gambettes, soignée, en dépit de la crasse environnante. Son crâne, s’en venait, s’appuyer sur l’appui-tête, les prunelles mi-closes, savourant cette fumerolle offerte, ruisselant dans ses entrailles, faisant disjoncter ses esprits. Délicate sensation, imbibant son corps, d’une légèreté appréciable, capable de la soulever dans les airs et de la faire flotter, cette princesse déchue. Pas décidée à partager son tube de bonheur, la brune, s’accaparant le joint, convaincue qu’elle en avait bien plus besoin que lui, de cet instant de sérénité. Entre les murs de sa perte de renommée. À quelques pas du lieu abritant sa plus grosse honte. Les prunelles entièrement closes et les pulpes, elles, recrachaient si lentement la fumée, que le geste inspirait la plus intense des sensualités. La plus enivrante des féminités. L’érotisme des pulpes humides, à peine entrouvertes, recrachant un peu plus de mort.
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Remy faisait le dos rond, comme un clébard qui viendrait de prendre un coup de pied au cul. Il se laissa humilier par les piques de Rosalia sans répliquer (ou presque), parce qu’il savait qu'à ce jeu, il ne gagnerait pas. L'homme s'imaginait que la laisser cracher son venin dans le vide lui rendait un peu de dignité, mais puisqu'il n'y avait qu'eux et que cela n'empêchait en rien sa fierté de se faire écorcher, l'on pouvait donc conclure qu'il s'agissait juste de lâcheté, en vérité.
Remy craignait la surenchère, car il se sentait nerveux, agité par quelque démon impatient tapis dans l'ombre. Son corps tendu réclamait une dose de quelque chose, n'importe quoi : un calmant à même d'apaiser son anxiété grimpante et repousser les mauvaises bêtes loin dans le noir. Il avait peur.
Tirer une taffe sur le joint l'aida néanmoins à remettre un peu d'ordre dans ses pensées. Il se sentait déjà un peu plus détendu qu'au début de leur rencontre. La perspective de la défonce à venir contribuait aussi à le tranquilliser, car il savait que les prochaines heures seraient douces quoi qu'il arrive. Rosalia pourrait même bien lui cracher à la gueule que ça ne lui ferait rien. C'était son objectif : il allait s'anesthésier la tête jusqu'à ce que plus rien n'ait d'importance. Il voulait tout oublier, y compris la gueule narquoise de cette poupée pour qui il prenait des risques inutiles.

C'était vrai : Rosalia lui brûlait la rétine jusqu'au cerveau. Naïf, il pensait que toute la faute revenait à son incroyable cul en forme de cœur inversé, mais la vérité était un peu plus complexe que cela. Il y avait quelque chose de dissonant chez cette naïade, un parfum familier qui lui donnait des sueurs froides. Remy ignorait encore de quoi il s'agissait.
Tout ce qu'il savait, c'était que la jeune femme sonnait faux et qu'en dépit de ses grands airs, quelque chose du naufragé chavirait dans ses yeux. Elle sentait la saline du grand large et la peur, les embruns, la puanteur des viscères de poisson : un mélange qu'aucun parfum de luxe, aucun savon, aucune crème parfumée, ni huile précieuse, n'était à même d'effacer totalement (surtout au nez d'un gamin de la côte). L'odeur de la honte imprégnait la maille des fines étoffes qu'elle portait.
Il le sentait, le clébard. Au milieu de tout, de sa rudesse, de ses désirs incontrôlables, de sa solitude, de ses peurs à lui, il le sentait. Ça le confondait, ça l'intriguait et c'était pourquoi il en redemandait tant et tant.

Après quelques secondes, semblant un siècle, Remy revint à lui. Il entrouvrit les paupières. Un silence de mort régnait dans l'habitacle, rompu seulement par l'impact de quelques rares gouttes de pluie sur le pare-brise. La chaleur des deux êtres contribuait à peine à réchauffer l'air ambiant. Il attendit cependant encore un instant avant de tourner la tête en direction de Rosalia. D'abord un rapide coup d’œil (afin de s'assurer discrètement qu'elle ne le regardait pas) puis le menton, sans un bruit.
Elle fermait les yeux et ne bougeait pas, s'accaparant le joint pour le bien de sa propre défonce. On aurait dit une morte dont l'âme s'échappait lentement par la bouche. Remy  trouva ce spectacle incroyablement effrayant et aguicheur. Il en avait presque le souffle coupé. Ses yeux bleus restèrent accrochés à la sirène pendant de longues minutes. Lorsqu'il fut lassé d'observer son visage, son regard descendit le long de son cou, dont les lignes apparaissaient derrière les mèches de soie noire en chantant leur mélodie tentatrice. L'homme vérifia une nouvelle fois que les yeux de Rosalia étaient bien fermés, puis il regarda la forme imprimée dans les étoffes luxueuses par ses petits seins.

Après quoi, un sentiment de honte s’empara de lui et il détourna la tête en direction de la fenêtre. Aussi médiocre qu'un animal en rut. Remy sentait la nervosité le gagner de nouveau. Sa jambe s’agitait en un trépignement nerveux. La situation dépassait ses capacités de compréhension. Il n'eut donc d'autre choix que se tourner vers elle et la punir en lui prenant le joint des mains.
Les prunelles aigue-marine cherchant activement la contrariété sur les traits de Rosalia, il tira une longue latte. Mais la sensation d'engourdissement venait trop lentement à son goût : il ne consenti donc à lui rendre le joint qu'après avoir tiré une seconde fois.
Injustice enfantée par quelque cruauté pudibonde.
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La croupe s’aplatissait sur le tissu du siège, s’enfermant à l’intérieur du véhicule. Protection contre le froid, sur laquelle elle ne crachait pas. Les phalanges glacées par l’agressivité du froid du coin. Elle regrettait les plages du sud, où l’été paraissait éternel, tant la saison chaude durait dans le temps. Rosalia, elle tirait un peu plus la gueule, au fil des jours, assistant à son bronzage qui s’estompait, ces traces de bikini qu’elle ne portait plus sur l’enveloppe charnelle. Elle déclinait, perdait de sa lumière, l’étoile, jusqu’au soir, où elle s’éteindrait, en s’écrasant de toutes ses forces sur la terre. Envoyant valser la terre et la végétation, rasant une surface incommensurable, à l’image de tout le malheur accumulé. Rosa, elle ne laisserait rien intacte, enflammerait la moindre parcelle de vie, pour que l’univers s’achève à ses côtés, dans des cris stridents, désarmants. Aucune pitié, jusqu’à la dernière seconde. Le souffle ultime ravageur, destructeur. À l’image de cette fumée, s’extirpant de ses pulpes charnues, légèrement brillantes de gloss, dégoulinant de désir. Elle sentait la toxicité de son geste, se frayer un chemin à travers ses entrailles. La gamine savait son ancienne vocation fichue, avec les mégots qui s’écrasaient sous ses semelles. Se bercer d’illusions, en même temps que balancer de la poudre aux yeux des autres. C’était à double-tranchant, Rosa. Elle dupait et voilà son esprit coloré de visions chimériques. Putain de vie, hein ? Un soupir s’échappait, lorsque le joint se consumait lentement entre ses doigts, rougis par le froid, tremblants, par moments. C’était bien rare, ces instants où elle fermait sa gueule, Rosa. Toujours acerbe et piquante, dans la taquinerie, avec un fond (non dissimulé) de méchanceté, pensant chaque attaque qu’elle lançait envers son interlocuteur. Ce qui la rendait si seule, sur une île qu’elle ne connaissait pas vraiment. En un an, tout avait changé : cette île ne devait être qu’un refuge, un havre de paix, où les De Luca devaient se reposer, prendre du temps pour eux, au milieu de l’agitation de leurs carrières et ces nombreux déplacements. Cela n’avait duré qu’une semaine. À se détendre, à manger et échanger quelques rires, entre les plaintes de l’étoile, jamais comblée, jamais satisfaite. Trop exigeante, à imposer un confort maximal à chaque occasion, ruinant les géniteurs, qui n’avaient jamais su dire non à leur petite adorée, crainte. Rosalia, elle les avait menés par le bout du nez, comme bon nombre de relations jusqu’à présent, loin de réaliser à quel point elle était toxique et mortelle, dans ses excès et caprices. Elle aurait besoin, d’une grosse claque dans la tronche, pour la ramener sur terre, lui faire prendre conscience que la crasse la recouvrait. Pire : qu’elle n’avait jamais été quelqu’un, dans ce bas-monde, qu’elle pensait, de tout son cœur, gouverner. Sans arrêt dans l’erreur, couplée à une perception erronée. C’était une belle ratée, sûrement la plus grandiose et bouleversante de toutes. Et en fermant les paupières, l’amertume ainsi que la colère revenaient à grandes enjambées. Énervée, qu’ils ne soient jamais revenus, l’avoir laissé dans cette daube, dans un monde qui lui était inconnu. Sourcil arqué, Remy, il s’assemblait bien à cette rage qui lui montait, cette colère qu’elle mettait dans chaque acte, chaque parole. Sans jamais se faire du bien. « Va dehors pour pisser, Médor. » Qu’elle pestait en désignant sa jambe tremblante des yeux, l’air dégoûté, en le regardant. Elle ne s’attardait jamais en étant sobre, Rosalia, dans ses regards, parce que les mirettes, elles en disaient long. Trop, même. Glisser, sans s’attarder. Sur cet homme qui comblait quelques soirées, par ci, par là. Peut-être la seule âme qui acceptait de se faire défoncer, lorsque la plupart des habitations passaient leur chemin sur la terrible Rosalia de Luca. Elle pivotait sur son siège, appuyée sur une cuisse, l’autre tendue contre le sol, pour river le joint de ses yeux, l’attrapant à la volée, comme le ferait un voleur de poches. La lueur espiègle dans les prunelles, plus détendue, la petite, qui le défiait du regard en glissant à nouveau le tube entre ses pulpes. Un bras sur son dossier. Incompréhensible, la mioche, une fois la défonce qui commençait à s'installer.
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Il l'avait vaguement toisée à sa énième invective, saisissant au vol l'expression de dégoût dont elle le gratifiait. Toutefois, cela l'affecta peu. Les substances actives du cannabis avaient eu le temps de faire leur effet et les deux dernières bouffées dont il venait de s'imprégner les poumons saturaient maintenant son cerveau de sensations agréables. Il s'envolait lentement vers quelque délice forcé, état de béatitude douceâtre dont le principal mérite consistait à tordre le cou au cours normal des pensées.
À ce titre, lorsqu'elle revint lui piquer le joint des mains, un air de malice dans le regard, il esquissa un sourire. Douce euphorie. L'homme montra les dents, mimant ce foutu clébard hypothétique auquel elle ne cessait de le comparer. Il grogna même de manière grotesque, dans une imitation curieusement réussie, avant de pouffer. C'était un effet direct du cannabis qu'il venait de fumer. Il avait envie de rire. D'ailleurs, il n'essaya même pas de s'en empêcher. L'effet désinhibant de la drogue offrait l'incroyable avantage de n'avoir rien à faire de rien.
L'odieux juge n'était plus, dans ces moments là. Il n'y avait que l'âme nue du simple mortel, dans toute sa médiocrité, sa petitesse. La morale partait en lambeaux, les jugements devenaient une cendre abandonnée au vent. L'esprit s'engourdissait et, dans les limbes, coulaient lentement les angoisses, les vieilles blessures, la culpabilité. Danse du présent.
Remy riait donc, en effet. Un spasme nerveux lui agitait les entrailles. Il se refrénait à peine. Cependant, après un moment, une nouvelle envie s’immisça dans son cerveau : l'envie de plus. Car il savait qu'à ce stade, des fantômes attendaient encore à la lisière de sa conscience. Il était en danger, sous la menace que l'un d'eux ne l'attrape par le col et lui rappelle combien cet état de bonheur était fragile, artificiel. Cette pensée le terrifiait toujours, même dans un moment de félicité comme celui-ci.
L'homme fouilla donc dans la poche intérieure de sa veste et sorti un cachet de Lexomil, un anxiolythique, dont l'usage normal était fréquemment détourné pour son potentiel récréatif. Le médicament avait néanmoins l'inconvénient d'être fortement addictif et c'est pourquoi on ne le prescrivait jamais sur de longues périodes. Malgré cela, Remy en consommait souvent et en quantité déraisonnable. Pour lui, le stade de la dépendance était déjà dépassé depuis longtemps.
Il en arrivait à additionner la prise de ces petits cachets blancs à de l'alcool (ce qui était fortement déconseillé). À ce titre, Remy s'en alla brièvement fouiller dans un sac qui se trouvait entre les deux sièges. Il en sorti une bouteille de bière et prit une gorgée afin de faire passer le comprimé. Le regard qu'il adressa à Rosalia, au passage, l'invitait à faire de même, si elle le voulait.
Puis, après un court moment d'hésitation, il prit deux comprimés de plus et offrit à la jeune femme de se servir dans sa plaquette. Il lui tendit avec un regard interrogateur, manière muette de lui demander si elle souhaitait glisser sur cette pente là avec lui. Ses prunelles aigue-marine soutenaient désormais le regard intense de la belle espagnole sans ciller. Plus rien ne l'effrayait désormais, car tout était flou. Il ne voyait plus les formes effrayantes dans le noir. Une sensation de bien être forcé incroyablement délicieuse lui tenait lieu d'espace mental. Rien ne l'inquiétait plus, rien ne l'atteignait. Il s'était rompu l'esprit, à en crever de plaisir.
Un plaisir qui montait toujours, à mesure que les composés chimiques affluaient dans son cerveau. Bien-sûr, il voyait encore Rosalia. Elle lui paraissait irréelle, presque comme un songe, mais toujours magnifique. Un ange déchu, ou bien en passe de le devenir. Car dans cet enfer qui était le leur en ce moment, il était tout à fait certain qu'aucun ange ne pouvait rester pur. Leurs névroses guidaient chacun de leurs faits et gestes avec l'autorité d'un chef d'orchestre. Seuls les mauvais aspects ressortaient de leurs rencontres, des appels à l'aide jamais formulés. Ils se poussaient mutuellement dans les ténèbres à coup de pied. Toute affection, toute compassion était exclue, comme s'il s'agissait d'un interdit explicitement stipulé tout en bas d'un contrat.
Une pitié.

Il l'aurait sans doute voulu, pourtant.
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Les quelques lampadaires du coin éclairaient à peine la frimousse de Rosalia : l’on était guère habitué à découvrir une gamine si calme, les traits détendus. Lâchés. Sereins. Elle, elle avait souvent l’air méprisante, dégoûtée ou énervée, à critiquer, vérifier que sa manucure n’était pas endommagée. Une de ces pétasses de films, que l’on admirait et redoutait en même temps, à cause de toutes ces paroles dénigrantes qu’elle distribuait, comme le ferait un étudiant et ses flyers. Celle qui cachait un terrible secret, abritant la clé du coffre-fort des illusions. Rosalia, elle n’était plus qu’une ombre, dans le fond. Tout se passait dans les coulisses : ses paumes fébriles poussaient… Et poussaient les chimères, se bousculant dans le couloir. Peinant à les contenir, alors qu’elles s’accumulaient. Rosa, elle faisait tout pour éviter qu’une plaie surgisse et se dévoile au grand jour. En dépit de la méchanceté qu’elle s’efforçait de répandre, Rosa, elle était surtout bloquée, émotionnellement. Ne comprenant pas pourquoi n’arrivait pas à parler, pourquoi elle ressentait tant de gêne et de honte face à ses émotions, qu’elle refoulait encore et encore, préférant exhiber une version superficielle, maléfique de son être, plutôt que la gamine meurtrie. Celle criant « à l’aide », dans le fin fond des Enfers. La poupée fissurée, d’avoir été trop balancée contre un mur ou deux. Une gamine qui ne savait pas y faire dans le vrai monde, loin de celui illusoire dans lequel ses parents l’avaient élevé. Rosa, elle cachait un énorme manque de confiance, sous ce narcissisme exagéré, cette coquetterie excessive. Un putain de complexe ambulant couplé à des carences, qu’elle ne faisait que nourrir d’insécurités, d’excès. Alors, la voilà, à se damner, à coups d’herbe et de joints, priant pour que les cauchemars s’éloignent. L’effet ne durait pas. La plénitude ne durait que quelques heures et s’effaçait, d’un revers de poignet, lorsque le soleil commençait à colorer l’horizon de teintes ardentes. Elle profitait, croquait à pleines dents, cette sensation divine, de l’apaisement immédiat. Les traits de son minois apaisés, relâchés, dans une sorte d’expression reflétant le prélassement. Les siestes au soleil. Le sable entre les orteils. Le bruit des vagues, se fracassant sur les rochers. L’odeur du monoï, sur sa peau brûlée par le soleil. Ses seins et fesses nus. Toutes ces sensations qui lui manquaient : la détente, le repos de l’âme. Cesser de se scalper l’esprit à coups de cutter et de lames aiguisées. S’empêcher de refaire sa vie avec des « si ». S’allonger, fermer les yeux et savourer le goût iodé, imprégné sur ses lippes pleines. Se vouer à l’exotisme et la dolce vita qu’elle avait tant aimé, avec ses parents. Ce brin d’amertume était lui aussi gommé, par le joint. Les quelques taffes tirées, lui octroyant une expression plus légère, lorsque ses prunelles, légèrement rougies, se posaient sur le visage de Remy. Il ne se passait plus rien dans sa tête, pas conscience, encore moins réactive, elle planait, virevoltait sur des nuages de coton, Rosalia. Elle eut un rire, assez rare pour le souligner, lorsqu’il imitait le chien, tout aussi défoncé qu’elle. Encore redressée sur son fauteuil, elle se penchait en avant, mécaniquement, vers lui, ouvrant la bouche, sortant de peu sa langue, pour qu’il vienne, Remy, déposer les comprimés de lui-même. Soufflant à son oreille, rivant ses prunelles évasives des siennes. Que sa chaleur l’enveloppe. Que son parfum le cogne. Qu’il soit maître de la suite, à laquelle elle ne s’opposait pas, Rosalia, se dévouant à une soirée de détente, tant nécessaire à sa survie dans le bas-monde.
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Il vit la jeune femme réagir à sa proposition muette par une posture aguicheuse. L’homme avait beau planer totalement, il comprenait encore ces choses-là. La manière dont elle le regardait était sans équivoque : elle voulait l’allumer un peu. Son souffle chaud, sa présence toute entière prenait des allures de chant des sirènes. Rosalia était belle. Remy sentait encore l’odeur de son parfum sous le tabac et le cannabis. Une senteur dont il ne percevait habituellement que des bribes, accompagnées de gestes ou de piques chargés de mépris, au point qu’il avait presque associé les deux. C’était la première fois qu’elle lui offrait une vue différente de sa personne.
Les barrières s’abaissaient un peu, mais ce qui en ressortait n’était pas tant la sincérité crue qu’une manipulation plus agréable. Cela dit, Remy n’avait rien contre, bien au contraire. Il n’attendait rien de Rosalia, pas même son affection. A dire vrai, il était comme une épave pourrissant sur une mer de rocher, content de voir un nouvel esquif rejoindre le cimetière, car cela faisait de la compagnie. Cette poupée là avait beau se comporter de manière odieuse, elle acceptait tout de même de partager un moment avec lui. C’était le plus important, à ses yeux (ce qui en disait long).
Avec Rosalia, Remy se laissait volontiers glisser dans l’abime. Il ne se sentait pas obligé de faire semblant que tout allait bien, d’être poli, bien intégré, de faire des compromis, d’avoir de la conversation, de prendre des nouvelles, de rester à sa place. Il était lui-même, dans toute sa médiocrité : un individu insignifiant et terne, rongé par les angoisses et la honte.
A ce titre, il y avait de quoi s’étonner de voir un homme préférer cet état à celui de la dignité qui consiste à garder pour soi les aspects les plus sombres de sa personne, à la poursuite d’un but supérieur consistant au maintien d’une bonne cohésion sociale. A dire vrai, Remy était incapable de justifier cette préférence. Il avait à cœur d’être quelqu’un de bien, mais paraissait intimement convaincu qu’il n’y parviendrait jamais, ou alors au prix d’un odieux mensonge.
Montrer son vrai visage à Rosalia, celui du pauvre type qu’elle pouvait mépriser à loisir, devait le soulager d’une manière ou d’une autre. Celle-là, au moins, se comportait de manière appropriée. Bien-sûr, il s’en défendait. Il lui rendait son mépris, quand la lâcheté ne le poussait pas à faire la sourde oreille. Il la regardait sombrement, songeant à sa peau, otage (à demi) de puissants et honteux désirs.

Tout ceci formait un amalgame indiscernable au cœur de Remy. Dépassé, il se laissait manipuler par ses propres mouvements intérieurs, laissant les vieilles blessures gouverner sur la raison.
Ainsi, quand elle se pencha sur lui, la bouche entrouverte, il plaça le comprimé entre ses incisives et riva la belle espagnole de ses yeux aigue-marine. Ces derniers brillaient du reflet de nombreux sous-entendus. Il approcha d’un mouvement lent mais dénué de toute hésitation, avant de venir coller sa bouche à la lèvre fendue contre les pulpes chaudes de Rosalia. C’est ainsi qu’il lui donna le cachet.
Le contact brulant, arraché au détour de ce défi muet, coïncida avec l’afflux des composés chimiques contenus dans les trois comprimés précédemment ingurgités, dans son cerveau. Cela lui fit l’effet d’une véritable explosion, comparable à la mort (sans doute). Tout son être, jusqu’à son âme, s’était simplement disloqué. Il sentait le sang battre dans ses tempes, résonner dans sa gorge et sa poitrine, comme un bataillon furieux.
Le souffle court, comme sous l’emprise d’une émotion très vive, il finit néanmoins par rompre ce contact. Pour autant, il ne s’éloigna pas tout de suite, restant dans l’intimité de son souffle chaud, le regard mi-clos rivé vers le sol. Son esprit était vide, ce qui l’empêchait de se sentir véritablement bouleversé.
Pourtant, il aurait dû l’être.

Il aurait voulu l’être.
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L’on voyait bien, à ses prunelles floues, qu’elle n’était plus vraiment elle-même, Rosalia. L’avait-elle déjà été, elle ? Pleinement, sincèrement ? Rien n’était sûr, lorsque l’on se penchait sur le désastre qu’elle incarnait. Incapable d’adresser un sourire qui signifiait quelque chose, pas capable de tisser des liens. Les natures effacées, pour ne laisser qu’une Rosalia, perdue, paumée, dans un monde inconnu. La princesse lâchée en pleine forêt. Elle ne réussissait pas, rien ne lui allait bien : Rosa, elle était confuse et désorientée, comme si un coup de soleil avait heurté sa caboche, perforant la rétine, la rendant totalement étourdie et aveugle, inconsciente, dans cet environnement. Elle ne voyait que de la flotte à perte de vue, la pauvreté et la misère de ces habitants, prétextant qu’ils se contentaient du minimum, en étant très heureux. Rosa, elle ne les croyait pas, les traitait de menteurs, parce qu’à son esprit, il était impossible de ressentir une telle euphorie, un soulagement pareil, les pieds dans une flaque ou la merde. Elle n’y voyait là qu’un tissu de mensonges, l’esprit enveloppé d’une étoffe de soie, façonnée par ses parents, afin qu’elle ne voit que l’abondance et les bijoux de ce monde, sans jamais se retourner sur les personnes dans le besoin. Jamais. Elle les tolérait, à peine, ces miséreux et il en faisait partie, Remy, même s’il accédait à une version différente de l’impitoyable. Aux mirettes mitraillantes. Habituée à être dans la maîtrise, le contrôle, Rosalia, elle se métamorphosait, au contact de la drogue, des médicaments. L’on voyait une facette peu connue, certainement mal connue et peut-être faussée, dans le fond, parce qu’elle n’était jamais molle, aguicheuse ou même avenante. Toujours renfermée, elle ne glissait ses prunelles brunes sur personne d’autre que son reflet, celui parfait, que reflétait le miroir. Il y avait tant à voir, si l’on prenait le temps, de se faufiler entre ses lignes, pour déceler l’erreur de conjugaison ou la mauvaise note sur la partition. Ce serait perdre le contrôle que de se livrer, alors même dans un tel état, où elle ne répondait plus d’elle-même, elle ne prenait pas encore conscience, qu’elle pourrait se faire prendre à son propre piège. Si la langue se déliait, se mettait à glisser des hypothèses pâteuses, mollassonnes. C’est ainsi qu’elle se présentait, mal installée sur son fauteuil, se penchant, avec une certaine nonchalance vers le brun, ouvrant la bouche, tirant la langue. Soufflant lourdement sur sa nuque, elle avait le souffle brûlant, capable de foutre le feu à l’habitacle, la gamine à l’épiderme bronzé. Ses paupières closes, elle se laissait faire, particulièrement docile en cette soirée glaciale. La bouche, rapidement happée, par une chaleur similaire à la sienne, son muscle rosé glissait entre les lippes de Remy, y récoltant le fruit de sa débauche. D’une caresse sensuelle, langoureuse, étirant des frissons le long de l’échine, lorsque la drogue ne paralysait pas la moindre émanation de libido. La gamine finissait par attraper la lippe inférieure du marchand de rêves, entre ses quenottes. Juste le temps d’ouvrir ses mirettes, d’exercer une légère pression, de l’allumer un peu plus, avant de se reculer. Le comprimé s’évaporait à la vitesse de la lumière, contre son palais et sa salive, le dos affalé contre le dossier du véhicule. Elle se sentait appeler par le paradis, les paupières closes et son corps, entouré de nuages, d’un lit cotonneux. C’était un sourire bienheureux qui étirait ses pulpes, une vague de chaleur qui montait, montait, lui donnant envie de retirer son pull, de se foutre les seins à l’air dans le véhicule. Et dans une absence totale de jugeote, c’était bel et bien ce qu’elle faisait, envoyant valser son pull sur le côté, soit côté conducteur, les bras étirés derrière sa gueule, apaisée, voyageant, dans un univers magique, où plus rien ne l’emmerdait.
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Remy voyait trouble. Les attentions de la belle espagnole avaient foutu le feu au baril de poudre étiqueté « fantasme » qu'il gardait planqué au creux de ses tripes. L'homme se sentait gagné par un désir corrosif dont il percevait mal les contours. Une sensation physique plus que spirituelle, car du spirituel, il ne restait pas grand chose en ce moment.
Remy était bringuebalé par une ligne temporelle incertaine. La charge médicamenteuse qu'il s'était administré lui-même l'avait complètement retourné. À peine vécues, les secondes s'enfuyaient dans la brume : il n'imprimait plus rien, ne ressentait plus rien, si ce n'est un amas d'impressions très vagues et douceâtres dont il ne voulait surtout pas voir le bout.
Après un instant, il oublia même si le baiser que Rosalia et lui venaient d'échanger s'était bel et bien produit. Il en gardait pourtant quelques traces, sous la forme d'une tiédeur, d'un goût, d'un parfum laissé sur sa bouche, mais il n'était malgré tout sûr de rien. L'homme nageait en eaux troubles. Fort heureusement il était assit, autrement il serait sans doute tombé.
À ce titre, la vision de la belle brune ôtant son pull contribua à peine à chasser ses doutes. Remy se sentait comme dans un rêve et il n'y avait probablement que dans un rêve que l'on pouvait admirer la poitrine nue de Rosalia. Cette image, au lieu de l'éclairer, le confondit donc encore davantage.

Cependant, étant incapable de ressentir la moindre once de doute, d'anxiété ou de peur, il prit le vêtement qu'elle venait négligemment de lui lancer et y plongea le visage. L’étoffe était encore chaude. Elle sentait le parfum, le savon et la mer. Le poisson. Les viscères de poisson : la peau écailleuse, poisseuse, qui exhale au soleil ses derniers relents de saline, comme une agonie prolongée.
Remy était certain d'avoir déjà senti cette puanteur de mort sur elle. À chaque fois, cela lui arrachait un brin d'anxiété, comme s'il venait, en captant cette odeur à peine perceptible, de voir quelque chose qu'il ne devrait pas. C'était impossible à expliquer. Il n'y comprenait rien lui-même. Pourtant, c'était immanquable.
Cette fois-ci fit exception, car il baignait dans la chimie. Remy était bercé par un flot furieux, jeté par le fond comme une simple brindille. L'abysse était immense, bleu sombre, sans fond. Il se sentait couler, les poumons vidés de leur air, le corps sans force, l'esprit dépossédé de toute volonté. Remy ne luttait pas : les yeux rivés en direction de la surface, où ondoyaient quelques raies de lumière verte, le corps avalé par une pénombre de plus en plus épaisse, il se laissait couler. Ses bras flottaient, ballants, devant lui, ses vêtements remuaient au rythme d'un courant imperceptible et déjà, la cohorte des poissons voraces surgit d'on ne sait où, pour lui picorer les yeux et la bouche.

Quand il ouvrit enfin les yeux, Remy se trouva penché sur Rosa. Il lui mangeait la peau.
Les pertes de mémoire étaient fréquentes, lorsqu'il prenait trop de cachets à la fois. C'était un peu comme avec l'alcool, il perdait des pans entiers de ses soirées. Sa ligne temporelle s'écrivait en morse.
Quoiqu'il en soit, l'homme ne s'en étonna pas. Il continua ce qu'il était en train de faire, poussé par son envie croissante de toucher la jeune femme. Elle paraissait en avoir envie. Cela dit, Remy n'était absolument pas en mesure d'en juger correctement. Il ne voyait, ni ne comprenait grand chose, en ce moment. Rosalia pouvait bien n'être qu'un rêve, une chimère de plus, cela ne faisait aucune différence. Tout était flou, tout était noyé, jeté par le fond dans la grande saline. Lui, son esprit, ses peurs et ses doutes, se faisaient bouffer par une cohorte de petits poissons. Il était déjà mort.
Consumé par un intérieur en feu, Remy se heurtait aux galbes charmants de la jeune femme. D'une main, il prit appuis sur le tableau de bord, tentant de limiter la sensation de tangage qu'il ressentait et qui lui faisait perdre l'équilibre. Le levier de vitesse (ou bien était-ce le frein à main ?) lui rentrait dans le ventre, rendant l'ensemble encore moins confortable et plus précaire.
Cela dit, il en fallait plus pour dissuader un homme d'embrasser une poitrine nue. Celui-là s'y consacrait d'ailleurs avec beaucoup d'acharnement (quand les produits ingérés ne le rendaient pas simplement amorphe). Il se sentait parfois partir pendant quelques fractions de secondes. Puis, il reprenait ses assauts en véritable zombie libidineux. Le regard confondu dans la brume, presque vitreux, il avisait les reliefs de Rosalia. Il embrassait, caressait de sa main libre, ce qui pouvait l'être : un affamé conscient de la précarité de sa situation. Si ce n'était la belle qui, lassée ou bien prise d'un retour soudain du réel, repousserait ses avances, il finirait assommé par ses propres excès.
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