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 le silence des agneaux (sashenka)

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et voilà que je vous envoie, comme des brebis au milieu des loups ~
La journée a été longue. Comme toutes les autres avant, depuis bientôt vingt jours. Il rentre de la mer tous les jours vers les neuf heures du matin. Après, les heures s'étirent. Mets-moi en encore un. La barmaid le dévisage, de l'autre côté du bar. Mais le regard féroce de Drake la décourage à une quelconque remarque. Il tend son verre vide, attendant qu'une dose de whisky vienne le remplir. Même un double, tiens. Sourire féroce au bord des lèvres. Ce soir, il en a marre. Il sent l'usure, il sent le manque - et ça, ça, ça le dérange. La dernière personne qu'il est venu à manquer, c'est sûrement Enoch. Il y a vingt ans. Depuis, le marin est bien content de ne plus avoir autant manqué à personne que personne ne lui a manqué. Mais là, ça le picore au fond de la poitrine. Pour ça qu'il est sorti, ce soir, Drake. Il attrape son verre enfin rempli, remercie la générosité avec un clin d'oeil séducteur - plus fort que lui - et avant de quitter le comptoir, jette un coup d'oeil à l'écran de son téléphone. Toujours rien. Désespérément aucune notification. Pas un appel, pas même un foutu message. Il grince des dents, Drake. Il a essayé, pourtant. D'faire comme il faut. D'envoyer des messages qu'il sait à peine écrire tant il l'a jamais fait. De prendre des nouvelles, de témoigner maladroitement une affection qu'il n'est pas sûr de savoir gérer. C'est pas tant l'effort qui l'a dérangé. Mais le silence derrière. Faut avouer que ça, c'est encore plus mal passé. Alors ouais, il est sorti.

Il déambule dans le bar, pas encore assez éméché pour tanguer. P't'être qu'il va faire ça. Se saouler jusqu'à ne plus pouvoir marcher. Ouais, ça semble être une bonne idée, un bon projet. Au moins, ça lui occupera l'esprit et le corps. D'être là plutôt que de rentrer chez lui, dans son cottage trop p'tit mais trop vide, soudain, sans elle. Drôle comme un être peut prendre de la place dans l'environnement. Il repense brièvement à ces quelques semaines qu'ils ont passé ensemble. Comme des gens normaux, peut-être ? Comme une trêve délicate, une pause dans la guerre. Des vacances au soleil, ça n'aurait pas été mieux. Il enfouit ça loin dans sa mémoire. Pas envie d'y penser ce soir. Le verre solidement amarré dans la paume de sa main, il s'installe à une table déjà occupée. Deux sirènes tournent leurs minois délicats vers lui et un sourire naturellement charmeur s'installe sur le visage de Drake. Je peux ? Elles hochent la tête avec un rire étouffé, se regardant l'une et l'autre, les yeux brillants d'une excitation qu'il reconnait bien. Celle des proies qui se pensent prédateurs. Sans savoir que c'est lui qui est en chasse à cet instant. Il ne fait rien de bien méchant, après tout, non ? Et puis, est-ce qu'ils ont vraiment un code de conduite établi ? Qu'est-ce qu'il sait de ce qu'elle fout à Londres, en ce moment ? P't'être qu'elle ne lui répond pas parce que ça fait deux semaines qu'elle se tape un autre gars. Vous savez, un pas comme Drake. Un employé de commerce, un jeune avocat, un beau médecin. Quelqu'un avec de l'argent. Quelqu'un avec de l'avenir. Voilà la colère qui le pique encore, là au creux des reins. Qu'est-ce que je vous offre ? demande-t-il d'un ton chaud et bas, vibrant.
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et voilà que je vous envoie, comme des brebis au milieu des loups ~
Les pieds sur la terre ferme de Guernsey. Premier retour après deux semaines d'excursion sur le territoire de Sa Majesté. Une formation plus longue que les autres sur les dernières évolutions ; dernières méthodes assimilées pour mieux capter les naufragés. L’instruction durait sept jours. Une semaine crevante, nécessitant son flux d’effort. Allouant parfois quelques instants de relâchement inopinés. Bien entourée de celles et ceux consacrés à la vie des autres, Sash s’autorisait même quelques sorties. Rien de bien méchant, rien de plus agréable qu’un repas partagé avec ses confrères. Une opportunité pour partager ses expériences : les sauvetages réussis… et puis, les noyades inévitables. Toujours très tergiversées, celles-ci.
Le dimanche soir, la session se termine sur le congé collectif des aspirants comme des instructeurs. Le retour à Guernsey ne se fait pourtant pas tout de suite. D’abord, faire route en national express jusqu’à Portsmouth. Là-bas, prendre une chambre d'hôtel et rattraper les heures de sommeil manquées. Six jours, sans réservation aucune. Et là, tout ce qui s’y passe n’a rien d’attrayant ni d’agréable.
D’abord, une entrevue avec l’au-delà. Sur la stèle, on a gravé une Ivleva. La plus illustre. La regrettée. Celle qui lui manque. Celle qui l’aurait - paraît-il - élevée. Et puis, le reste des jours, elle obtient quelques audiences avec le mauvais ange. Raison de son existence, de son ascension dans la matrice. Les jours sont difficiles. Les nuits sont compliquées. Le téléphone reste éteint, sur la nébuleuse. Parfois, il s’allume pour trouver une adresse, un numéro de téléphone. Virevolte entre ses doigts, un peu réfractaire à cette forme de communication. [ Les messages qui s’affichent, elle les consultent à peine. Ignore leur existence. L’envie et le besoin de répondre n’existe pas. Car la tête est possédée, avalée par le vilain préexistant. Et les pensées veulent méditer et cogiter sur le présent. ]
Sur le ferry qui la ramène à Guernsey, elle reprend vie. Gonfle ses poumons au sel iodé. Le passé n’est plus là. Le présent, lui, s'immisce comme une caresse doucereuse. L’île en elle-même n’a pas eu le temps de lui manquer. Deux semaines, déroulées trop vite dans un rythme tumultueux. Pourtant. Elle n’a que son loup implacable en tête. Avant son départ pour Londres, l’eau sur leur estuaire était devenue si calme. Paisible, rassurante comme une trêve. Comme l’assurance d’une paix durable. Pourtant, elle se sait nouvellement coupable. [ Les messages, accumulés, restés sans réponse. ] Des justifications, elle en a à lui donner. Partie pour un instant si court. Si intense. Le premier gage d’excuse. Une explication, qu’il jugera forcément insignifiante.
Peu importe, puisqu’elle revient peut-être encore plus légère qu’avant.
Après ces moments mielleux partagés, ces non-dits abattus l’un après l’autre. Elle rentrait plus sereine. [ Erreur grossière ] Elle avait été si silencieuse pendant deux semaines qu’elle n’avait pas osé lui dire, lui donner l’indice suffisant sur sa date de retour. Alors, il ne lui restait qu’à prétendre vouloir lui faire une surprise. Pour adoucir, sans doute, son manque de tact. Et d’attention évident. Mais d’abord. Gaïa. A récupérer auprès de son apprenti.

Premier arrêt avant de rentrer, avant la douche et l’escapade jusqu’au cottage du loup : le bar, là où elle s’attendait à le retrouver - son petit apprenti, habitué à s’y rendre chaque dimanche soir.
Elle déambule alors avec son sac à dos militaire sur le dos, barda trouvé dans un surplus mille ans plus tôt. Elle a la dégaine de celle qui revient de loin. D’un voyage au bout de la terre, le limon sur les rangers. Les cheveux qui cachent son paquetage, l’écharpe kaki qui se suspend autour de son cou. Et puis, une sorte de vieux trailli vieilli par le temps. On la croirait devenue militaire, engagée chez les stratèges. Sans le savoir, tenue idéale pour la guerre qui se prépare.
La fausse aventurière se faufile derrière un couple sur les portes du bar. N’espère pas trop attirer l’attention à l’intérieur. Pressée par le temps. Pressée de le voir. Heureusement, il y a du monde ce soir. Et l’heure est déjà si noire que les yeux des ivrognes sont trop troubles pour la remarquer. Un bourbon, s’il te plaît. qu’elle commande, coincée entre deux hommes. Entrer sans consommer : blasphématoire. Le barman lui propose de prendre son sac, à l’arrière, sous le comptoir. Faut dire qu’il y a plus une table de libre où se poser. C’est ce qu’il lui dit. Elle récupère son verre, le porte à ses lèvres et fait volte-face pour chercher son apprenti, le dos coincé contre le comptoir. Elle scrute, fait l’inventaire des poivrots et des quelques marins qu’elle connaît. Et puis, ses yeux se heurtent à une vision exquise. Esquisse une risette d’agrément sur ses ourlets. Le loup n’est pas dans sa tanière. Qu’elle se dit à elle-même. Le hasard est délicieux. [ Bon sang, qu’il lui avait manqué. ]
Elle s’avance à peine et remarque autre chose. Deux têtes féminines, alléchantes et tentantes, pour tout séducteur trop facile à impressionner. Et l’expression se voile d’une marque obscure. Rappel d’une tendance qu’elle lui croyait oubliée : Drake et son penchant irréductible pour ses sirènes. Un retour à la case départ. Donne-moi deux autres verres comme celui-là. Son dos épouse à nouveau le comptoir. Le premier bourbon lui arrache la gueule. Mais pas plus que la vision, le spectacle offert par un fidèle à sa réputation. Le deuxième, elle se l’enfile avec plus de difficultés. Au bout du troisième bourbon, elle pourrait presque tanguer. Quelques minutes passent, suffisantes pour l'enivrer. Un autre. Cette fois, elle n’a plus la patience de le regarder séduire. De constater à quel point, rien n’a vraiment changé. Elle s’approche de la table, débarque comme une fleur au milieu de Drake et ses convives. Pose violemment son verre sur la table, dans un fracas qui briserait presque le contenant. Et bien et bien. Je peux me joindre à la marmaille ? Elle plonge avec ardeur ses yeux embués dans ceux du loup. Et puis, se raidit un peu, mêle ses lèvres à un rire plein de faussetés. Alors dites-moi, les donzelles. Racontez-moi, j’veux l’entendre de vous. Comment il s'y prend, là, pour vous séduire ? Dites-moi, aidez moi à percer le secret, les rites sacrés du grand séducteur. Allez-y ! Epatez- moi ! Ah elle n’a honte de rien. Là, au milieu des dizaines de clients agglutinés sur les tables autour.  Exagère ses moindres mots. Comme une pièce de théâtre, une véritable mascarade. Attendez. Ne répondez pas tout de suite. Laissez-moi constater par moi-même ! Buvons ensemble ! Puis terminons la nuit dans une chambre d’hôtel. Y’a rien qui lui ferait plus plaisir. Et puis, c’est pas comme-ci y’avait quelqu’un chez lui, dans son lit, à l'attendre. Quelqu'un à qui il tient. Non franchement, il en a rien à foutre. Ce qui importe, c'est l'trophée du jour. Comme toujours, finalement.

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Il faut dire qu'il ne s'en doutait pas. Comment aurait-il pu ? Sans nouvelles, le manque au creux de l'estomac comme seul en-cas depuis des semaines. L'impression qu'elle s'en envolée depuis dix ans, déjà. Tant sa vie lui semble être redevenue fade et morne. Habituelle. Retrouver cette routine à la fois chérie et haïe. Celle de courir les bars en espérant croiser une âme assez sale pour qu'il la harasse encore plus. Pourtant, Drake n'pense même pas à les ramener chez lui. Rien qu'à y penser, y a quelque chose qui le bloque. Même s'il lui en veut de l'ignorer de la sorte, d'même pas savoir quand elle rentre. Même s'il n'aime pas, finalement, comme elle le change - en bien, pourtant. L'emprise qu'elle a sur lui, finalement, depuis toujours, ressort aujourd'hui plus nettement et cela le dérange, c'est vrai. Il s'est toujours dit que personne ne le changerait ni ne l'influencerait dans rien - voilà qu'il lui avait fallu atteindre presque quarante balais pour se contredire tout seul. Non, il veut juste profiter. Sentir cette liberté, ce pouvoir qu'il a sur la gente féminine. Bien sûr que ça lui plait. Il n'est pas assez fier pour le nier. 
Sa voix s'immisce si fortement d'un seul coup qu'il se demande presque si ce n'est pas dans sa tête qu'elle vient de naître. Mais à en voir les yeux qui se baissent des deux demoiselles en face de lui, il en conclut qu'il n'est pas encore devenu tellement fou. Son rire sonne faux et grince contre la muraille de Drake, comme cette craie sur le tableau noir. Il ne se retourne pas, reste de dos et subit, réellement. Autour, il perçoit du coin de l'oeil les visages qui se tournent. Rien de mieux pour le ridiculiser. Rien de mieux pour l'humilier. Et ça, Drake y est - bien trop - sensible. À quoi joue-t-elle ? Qu'est-ce qu'elle fait là, d'ailleurs ? Lui qui voyait leurs retrouvailles bien autrement, si seulement il avait eu vent de son retour. Mais Drake le sait, d'puis le temps. Les rêves sont faits pour être brisés. Et sans le savoir peut-être, elle a tout gâché.

Il la laisse finir, la mâchoire serrée, la main aussi autour de son verre. Dire qu'il venait de leur acheter une bouteille et qu'elle est à peine entamée. Désolé, mesdames, j'crois que le dragon qui prétend m'attendre dans mon lit alors que celui-ci est vide depuis des semaines m'attend pour l'affrontement final. Il ose même leur faire un clin d'oeil. À ce jeu-là, mieux vaut-il peut-être ne pas le lancer. Les demoiselles osent un petit ricanement discret. Il espère que ça l'humiliera encore plus que de le surprendre ici. Sans se presser, il remplit leurs verres. J'vous prends ça. J'crois que je vais en avoir besoin. Nouveaux rires discrets. Il se lève enfin, la bouteille à la main, lui faisant face de toute sa hauteur. S'il garde un comportement insolent et détendu, comme s'il était maître de la situation, le regard qu'il pose sur elle, quand il ose enfin la regarder, est plus glacé que jamais. D'un vague regard, il note son air comme transformé. Il peine presque à la reconnaître. Ou est la sauveteuse qu'il connait depuis quinze ans ? Envolée, restée là-bas, à Londres ? On dirait une militaire revenant d'Iran. La dureté dans ses yeux, son ton si condescendant... Rien que d'imaginer ce qu'il a pu s'y passer pour recevoir pareil changement à son retour, cela lui retourne l'estomac. La colère en guise d'énergie, il attrape son poignet avec fermeté. Peu importe si elle tente de se débattre, de ne pas le suivre - Drake profite d'avoir plus de force qu'elle. Lutter ne lui sera d'aucun secours ; il la traîne littéralement jusqu'au dehors, saluant d'un geste de la main amical la barmaid, qui le dévisage pourtant avec sévérité. [ Il la traîne comme elle a traîné son ego dans la boue ]

L'air frais lui gifle le visage et il la lâche avec l'envie même de la jeter au sol. Il est hors de lui. C'est bon, t'as fini ton petit numéro ? crache-t-il vers elle, se retournant comme pour mieux l'affronter. Quelqu'un lui tapote sur l'épaule, il se retourne lentement, les crocs déjà sortis. C'est l'employé du bar. Lui tend un sac, le bras tremblant. Un énorme sac militaire, celui de Sashenka. Il le lui arrache presque des mains et le jette entre elle et lui dès qu'il a le dos tourné. Il a envie de le déchirer, de l'éventrer. De se venger, d'extérioriser la rage qu'elle a fait naître en lui. Si facilement. Si subtilement. Il la dévisage lentement, comme s'il prenait le temps de choisir ses mots, pour une fois. Mais on le sait bien. Le naturel revient toujours au galop. Ses vices ne le déserteront jamais et la hargne, elle, reprend toujours le dessus. Il croise les bras sur sa poitrine, pour se donner une contenance. Fixe son visage, ses cheveux dans lesquels il a envie de passer la main - à cet instant, peut-être, pour lui faire mal. Parce que mal, il a eu, durant ces deux semaines. Et plus encore maintenant. C'était ça ton plan ? M'ignorer royalement pendant ton p'tit voyage, débarquer sans rien dire avec l'espoir de me prendre la main dans le sac ? Il s'approche d'elle, presque menaçant. Le regard dur, frigide. Boire un verre en ville, c'est interdit ? Parler à d'autres femmes aussi ? Va falloir me faire une liste, Sashen. Regard mauvais. Et j'espère pour toi qu'elle n'est pas très longue, ta putain de liste, qu'il a envie de rajouter, mais la colère revient, plus forte encore. N'a-t-il pas toute sa vie évité pareille situation ? Ne jamais s'engager, ne jamais être redevable ? N'avoir aucune règle à suivre ? Mais ce qui le met hors de lui, c'est qu'elle le juge comme si elles les avaient trouvé dans son lit [ leur lit ] ces gonzesses. J'étais quand même pas en train de les baiser sur la table ! qu'il lui hurle dessus. Il laisse ses bras retomber, fait volte-face et chancèle un peu, abruti par sa rage. Ou par l'alcool ? D'ailleurs, il a toujours la bouteille de whisky dans la main et en profite pour en reprendre une lampée. Pour tenter de prendre sur lui. De se calmer. La situation le dépasse et il sait s'être emporté pour pas grand chose. Peut-être aurait-il mieux fait de rester assis. Ou de rentrer, seul. Parce que ça lui serait passé, n'est-ce pas ? Elle pensait qu'il resterait enfermé quinze jours durant, assis en tailleur dans son salon ? Et pourtant, pourtant, bordel, il n'a rien fait de mal. Pas vrai ? Lui ne voit pas ce qui pourrait lui coûter si cher en représailles, en tout cas. Il aurait dû les ramener chez lui, là, ça aurait été justifié. Mais même à distance, elle l'a retenue. Il s'allume une clope, la main légèrement tremblante. Tire dessus avec tension.
Mais au nom de quoi est-ce qu'il devrait subir ça, en fait ?
[ De cet amour, qu'ils n'arrivent pas à (di)gérer ? ]
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et voilà que je vous envoie, comme des brebis au milieu des loups ~

Un dragon. L’image est fidèle, bien choisie pour celle qui a le goitre cuit. La fournaise a été crachée. Balayée sans écran de fumée. La langue acérée brûle d'expédier d’autres mots incendiaires - mais meurt aussitôt dans l’asphyxie. Elles rient. Ricanent. Se régalent de sa dérision. Il remplit leurs verres. N'a-t-il pas fini de la mortifier ? Ses ongles s’enfoncent dans le derme de sa paume. Ses mirettes ne perdent pas une une bribe de la scène qu’il lui joue. Le chasseur, désormais redressé sur ses pattes, minaude sa dominance au jeu. Il se dresse, supérieur, créant l’envie à Sashenka de faire explosion de ses phalanges dans son minois. Ses mains sont moites, se privent de ce déchaînement de fureur parfaitement légitime. Les pervenches du prédateur souhaitent congeler ses membres. Mais elle n’a pas peur, l’affronte avec la même dureté. En attrapant son poignet, le chacal déclenche chez elle une déflagration. Arrête, lâche-moi ! Qu’elle scande. Il n’écoute pas. Sa main emprisonnée réclame à se défaire de son geôlier. Convulse pour se délivrer mais fléchit devant sa vigueur et son degré de puissance. Une force qu’elle lui connaît. Qu’elle apprécie à four doux, dans leurs duels tumultueux mais plus plaisants. Ici, elle abomine d’être si chétive. Il la traîne jusqu’à dehors et la lâche comme un objet maudit. Artefact qu’on aurait tort de protéger.
Son petit numéro ? Elle le voit qui tourbillonne, qui se piaffe comme un pugiliste prêt à administrer ses coups. Ils sont dérangés par le barman qui se trimballe avec son sac. Drake le récupère et l'expédie entre elle et lui. Il s’approche, grondant, débite un flux de conneries pour se dédouaner de ses inclinations douteuses. Le dos tourné pendant quinze jours. Le grand séducteur. Déjà de retour.
Il lui hurle dessus comme un furieux, dégueule toute sa rancoeur et lui fait dos pour se griller une clope. Enivrée et pourtant, se croyant en pleine possession de son corps et de son esprit, elle s’élance sur lui dans un rugissement sonore. Pressant ses paumes contre l’échine du loup, elle s’essaie à le faire tomber mais s’écrase elle-même contre le bitume. Elle beugle, vocifère comme rarement il l’a vu sortir de ses gonds. La titubante se relève d’abord sur ses genoux, puis se remet en chancelant sur ses pieds.  Quinze. Putains. De jours ! Il lui fait face maintenant. Et ses paumes s’écrasent sur sa face ventrale une première fois, pour le repousser en arrière. J’suis partie… quinze putains de jours. Deux semaines à trimer. Et toi. Et toi tu… tu fouttais quoi ? Hein tu f’sais quoi Drake ? Elle réitère son geste puis semble se parler à elle-même. Marche de gauche à droite comme une possédée. Baragouine un charabia indéchiffrable.
Elle resserre l’étreinte de son écharpe autour de son cou, toujours plus fébrile, toujours plus secouée par une agressivité habituellement peu fréquente. Elle s’avance de nouveau vers lui, maîtrisée par sa rage. T’adores ça hein ? Jouer l’innocent ? Combien ? La question lui brûle les lèvres. Combien dans son lit depuis son départ pour Londres ? Combien de sirènes enroulées autour de son cou ? A subir ses draps, son ardeur, ses délicates attentions. Tu t’en es enfilé combien ? Pour satisfaire ton appétit bestial ? Comme une droguée, elle lui extirpe sa bouteille des mains ; s'arrache le gosier de quelques perles d’eau-de-vie.
Pas en train de les baiser sur la table. Et si elle était arrivée plus tard, infiltrée dans sa chambre ? Et si elle avait débarqué le lendemain ? Difficile de lui faire confiance sur ce point. D’accorder crédit à une rencontre banale, en toute innocence. Ou alors, aurait-elle été moins indignée quelques semaines plus tôt. Ou contrariée d’une manière différente. Mais les jours heureux partagés lui avaient fait croire à une renaissance. Aux prémices d’une postériorité tangible entre ces deux paumés. J’suis vraiment trop conne. Elle hurle. Elle est vive. Ne masque pas son exaspération. C’est ça… C’est ça l’avenir que tu voyais pour nous deux ? En me demandant de m’installer avec toi, t'espérais quoi… tremper ta queue à droite à gauche, chaque fois que j’ai le dos tourné ? Là, elle prétend le vouloir pour elle seule. Prétend ne pas souhaiter partager. Comme un engagement. Mais lui avait-elle déjà accordé une réponse ? Avait-elle ne serait-ce qu’accepter de vivre avec lui ? Pouvait-elle lui reprocher quoi que ce soit d’aussi fou ? Il lui avait laissé du temps pour réfléchir, pour décider après cette irréaliste soirée. Mais là, pourtant, elle lui parlait comme quelqu’un qui a déjà tout accepté. Et voilà qu’elle doute de sa fidélité, celle à laquelle ils ne sont jamais promis. Que faut-il comprendre alors… de la jalousie ? Ou bien le choc, de l’avoir vu en si bonne compagnie ? [ La faute au spiritueux, peut-être ? ]

Elle délire. Pas elle-même. Plus elle-même.

Ses yeux virent nerveusement aux larmes. Qu’elle efface d’un geste de manche. Elle se calme à peine, se noie dans un alcool trop fort à supporter. Je croyais... Elle croyait qu’un semblant de loyauté se serait tissé entre eux. Que les instants passionnés partagés avant son départ seraient les fondations de quelque chose de plus grand. De plus important pour ces deux échoués.

[ Pas elle-même. Pas la conscience tranquille, pas les capacités pour voir à quel point le retour au bercail à Portsmouth l’a fragilisé. Détraquée au point de soumettre Drake à des mots tranchants et mille fois trop injustes. Perdre pied, tout gâcher. A forcer - peut-être - le point de non-retour. ]

Tu parles d’un plan. Comme-si j’en avais un. Comme-si j’avais planifié de te voir entouré de ces femmes. C’est censé être moi l’ordure dans l’histoire ? Elle rive ses yeux cristallins dans les siens. Finalement, t’aimes t’amuser avec moi hein ? M’faire comprendre à quel point j’vaux rien pour toi, c’est ça ? T'aimes trop m'cracher à la figure ? M'écraser ? Me montrer à quel point je suis qu'une souillure ? Hein. Hein pap... Elle s'immobilise, reporte le goulot à sa bouche et sent que l’alcool lui fait défaut. Que la nausée n’est plus très loin. Tout est arrivé trop vite. Tout est arrivé trop fort.

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Il avait cru.
On ne sait pas vraiment quoi. Et il ne sait plus vraiment non plus. La trêve lui avait semblé si inespérée. Inédite. Et pourtant, alors qu'elle lui rabâche la longueur de son voyage - quinze putain de jours - il a envie de lui dire que c'est aussi la durée de leur... quoi ? On peut appeler ça une relation ? Elle s'approche soudainement de lui, féroce prédatrice et attrape son échine. Que cherche-t-elle à faire ? Drake l'ignore et ne le saura pas - elle chancèle rapidement. Il a hésité à la retenir mais sa colère prend le dessus ; il la laisse rencontrer le sol. Mauvais, elle peut bien se débrouiller avec tout ça. Elle semble hors d'elle-même, dans une fureur que Drake ne lui connait pas. Et il ne sait plus trop si son immobilité est dûe à sa colère ou à sa surprise, finalement. Que lui est-il arrivé, là-bas ? Elle revient vers lui et solide comme un roc, il ne bouge pas. Se laisse décaler en arrière de quelques centimètres quand elle le pousse. L'envie furieuse de lui attraper les poignets. L'immobiliser, lui hurler dessus. Pourtant, il ne bouge pas, Drake. Il s'est figé, semble ankylosé. L'espoir euthanasié, déjà. Voilà qu'elle s'éloigne. Fait les cents pas, parle toute seule. C'est presque l'inquiétude qui perle aux coins des yeux du marin, même s'il a trop de fierté - plus encore dans cette situation qu'il trouve purement injuste - pour tenter de savoir si elle va bien. Drake regarde défiler devant lui un mauvais film dont il ignore même son rôle. Il ne comprend pas. Pourquoi s'acharne-t-elle sur lui avec une telle force ? Il essaie de comprendre, dans sa tête, la mettant presque en sourdine pour pouvoir réfléchir. Faire le point. Il a pu être un vrai enfoiré, autrefois, durant ces quinze années, c'est clair. Quand rien n'était officiel. Puis, après maintes et maintes guerres, il lui avait dévoilé un bout de son âme, il lui avait tendu de ses mains moites un bout de lui, une partie de son coeur, certainement. Il n'avait eu aucune réponse en retour. Mais il avait pris sur lui. Lui avait laissé le temps. Tout ça pour récolter quoi ? Une haine pareille ?

Plus encore, il est blessé. Et de la douleur, on le sait, nait la rage. Un chien blessé mord. Et là, il se sent trahi. Est-ce que c'est vraiment cette image-là qu'elle a de lui ? Ses mots... la peinture qu'elle donne à ses traits - cruel, menteur, manipulateur, infidèle (...), est-ce que c'est vraiment celle-ci qu'elle a dans la tête ? C'est l'image qu'il lui a ancrée ? Il attrape au vol de son regard les larmes qui perlent à ses yeux, s'en échappent. Mais il n'est pas même attendri, là, Drake. Il se sent sali, trahi, humilié. Il doit forcément y avoir autre chose. Même elle doit savoir qu'il n'aurait pas réagi de la sorte s'il l'avait trouvé en train de boire des verres avec les gars de son équipage. Quel droit pense-t-elle avoir de le traiter comme s'ils étaient mariés depuis vingt ans ? Non seulement, ils ne se sont rien promis mais en plus, il n'a pas franchi cette limite tacite sans qu'ils ne l'aient évoquée pourtant. Elle lui a volé la bouteille, il s'en contrefiche. Il en a d'autres chez lui, au pire. Il la fixe toujours, sans avoir ouvert la bouche, la mâchoire serrée. Plongé dans un mutisme irréel, lui qui explose si facilement habituellement. Rôles inversés. Il la sent chanceler de nouveau après sa dernière gorgée et soudainement, il semble se réveiller. Il lui arrache la bouteille des mains. Tu crois pas qu'ton état est déjà assez poussé, là ? grogne-t-il en éclatant la bouteille derrière-lui avec hargne. Il s'approche d'elle, et dans ses yeux clairs, on peut y lire deux émotions contradictoires qui tentent de voler le terrain à l'autre. D'un côté, la colère, froide et tumultueuse. De l'autre, la faille meurtrie que ses mots viennent d'ouvrir. Jamais, mais alors jamais il n'aurait pensé qu'elle le voyait ainsi. Et c'est ça qui le blesse le plus. Dans tout ce qu'elle a craché, dans tout ce qu'elle l'accuse, c'est le portrait qu'elle peint qui le blesse le plus. Et finalement, c'est la douleur qui l'emporte. La colère semble le quitter vivement et il baisse le bras qui a jeté la bouteille en quelques éclats de verre et d'alcool. La sonde, lentement, en prenant son temps. Pousse un soupir long, douloureux. Tu sais quoi, Sashen ? Si c'est vraiment comme ça que tu me vois, j'sais même pas pourquoi t'es rentrée... Il déglutit. Effrayé à l'idée qu'elle ait pu, là-bas, rencontré quelqu'un. Forcément mieux qu'lui, c'est pas très difficile. Quelqu'un qui lui aurait dit tu sais, c'est qu'un connard, il se fout de ta gueule et te trompera toute ta vie. Parce que c'est ça, qu'elle dit, non ? Est-ce que quelqu'un lui a mis ça dans le crâne ? Ou, pire, est-ce qu'elle le pense depuis toujours ? Si tu penses que tout c'que je veux, c'est t'écraser, tu ferais mieux de te casser. Les dents serrées, il se tourne une nouvelle fois vers elle. Son regard est glacial, sévère, [ blessé ]. Comment peut-elle le voir ainsi... après les deux semaines qu'ils avaient passé ensemble ? Quelque chose lui échappe et il sent qu'il n'aura, de toute façon, pas la réponse ce soir. Peut-être jamais, si elle suit les conseils acérés qui sortent de sa bouche. Il s'approche encore, se place à hauteur de son visage, féroce, menaçant. Mauvais, il secoue la tête comme s'il était profondément déçu, ce qu'il est. Si t'arrives à te calmer, tu peux venir en discuter calmement chez moi. Si tu n'peux pas, alors on s'expliquera une autre fois. Là, ça sert à rien. Je ne sais pas ce qu'il s'est passé à Londres pour que tu t'acharnes comme ça, mais clairement, ça a fait de moi un monstre encore plus cruel qu'avant. Nouveau soupir. La colère s'en va. Laisse l'homme seul, qui baisse les yeux. Presque un enfant. Son calme est anormal, cela ne lui ressemble pas, si enclin à la violence, si facilement consumable par les braises de la colère. Pourtant, Drake est d'un calme effrayant. Troublé et troublant. Peut-être qu'il n'a jamais été frappé aussi fort, finalement. Regarde-toi, qu'il siffle, mauvais et las à la fois. Lui est-il déjà arrivé, lui, de se mettre dans un état pareil ? Pour si peu ? Il ne la reconnait pas et finalement, c'est peut-être ce qui l'effraie le plus. Il recule de plusieurs mètres, trébuche sur les briques de verre mais se reprend sans mal. Ne détache pas son regard du sien. Comme pour graver cette image dans sa tête, la voir nauséeuse, à vomir de cruauté. Comme pour s'en rappeler, quand il lui faudra la détester plutôt que la pleurer. Il semble hésiter à se retourner, ouvre la bouche, déglutit. Ma porte reste ouverte tout le temps, tu l'sais. Mais là, j'peux pas Sashen. J'peux pas discuter avec toi dans cet état. Et j'dois aller sortir Posé. Et il fait volte-face.

Coupe derrière le bar pour prendre un de ces chemins de campagne menant directement au phare. Dans quelques minutes, il y sera. Il sortira Poséidon dans l'air de la nuit, qui lui semble soudainement encore plus ténébreuse. Encore plus terrifiante. Serre les dents pour retenir les larmes. N'veut pas pleurer pour ça. Démêlera tout chez lui, parce qu'elle ne le suivra pas, n'est-ce pas ?

Il avait cru, oui.
Que ça s'apaiserait. Lui avait semblé, ces quinze jours où la colère avait fait grève, que les démons se faisaient plus dociles, moins présents. Qu'il aurait pu lui avouer, finalement. Tout ce que sa proposition suggérait sur ses sentiments. 
Il avait cru, oui.
[ Et ce soir, il ne sait plus vraiment en quoi. ] Ni s'il s'en souviendra un jour.
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