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La mer pleure une cantilène
Où passent railleurs les flonflons
Mais c’est de sanglots qu’elle est pleine
Elle et moi nous nous désolons |
L’aube au point mort et déjà le port qui s’affole ; la besogne des pêcheurs brisant son mutisme. L’insomniaque se joint au chahut au rythme d’une cantilène maritime, fredonnant grossièrement ses paroles oubliées. La nautonière ayant déjà disposée l'embarcation pneumatique - aux fières couleurs du SOG - patiente à l’ouverture du ponton. Le fessier posé sur son escalier, c’est l’instrument phare des cancéreux qui se balade mollement sur ses lippes. Le sommeil fragilisé par les spectres de ses périples les plus apocalyptiques, le port la sait habituée à émerger dès les premières lueurs. Ses lucarnes à demi-closes, la sauveteuse zieute la clarté du jour à peine avivée, rencognée en amont du pesant frimas. Le climat capricieux, propre à son île, se complet dans ses nébuleuses. Là-bas au bout du ponton, le boudin en forme de U attend d’accueillir Liam, le canotier en instruction. Premier apprenti de Sash depuis son enrôlement au RNLI, l'adjointe à la barre se sait parfois âpre et bourru avec le novice. Attentive à ses faits et gestes et autoritaire quand le besoin s’en fait sentir, son application des bonnes pratiques se doit à la hauteur des exigences du métier.
C’est comme seule maîtresse du zodiac que Sash entend conduire le garçon en exercice. Sauveteur volontaire depuis seulement quelques mois, la secouriste prévoit jusqu’au déjeuner un programme plus tranquille que d'accoutumée. Écrasant le filtre empoisonné sous sa semelle, Sash quitte son trône de pierre pour s’infiltrer dans le hangar consacré à l’équipage du SOG. Le mégot inanimé jeté à la poubelle, l’ombre qui passe le seuil du hangar attire immédiatement son regard, étirant in extremis un sourire sur ses lippes : - Jamais l’temps de poireauter avec toi. Tu m’enfiles ta tenue et on s’retrouve sur le ponton. Les salutations sont absentes. Pas de sens logique au bonjour, bonsoir, quand les journées de la dame ne connaissent aucune halte. Le matin équivaut au jour précédent et la nuit n’est qu’une coupure transitoire. - J’te conseil de mettre des gants bien serrés sur tes griffes. C’est toi qui pilote le zodiac ce matin ! les commandes rarement prêtées aux novices et encore pis, aux non-détenteurs du permis bateau. Pas sûr que l’idée soit engageante dans les yeux du gamin, pourtant Sash y tient, avec l’envie de partager son fardeau.
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