wonderful life - drake

Toujours pas de réponse. N'arrête pas de regarder l'écran du téléphone, en vain. Lui qui se croyait détaché de tout ça. Lui qui s'croyait à l'abri - tu parles. Cause toujours. Il a le sentiment de s'être laissé piéger, d'avoir mis les pieds dans un jeu auquel il n'a pas prêté attention aux règles. Le goût amer dans la bouche, soudain, ces deux semaines auprès d'elle comme une trêve inespérée. C'est pour ça qu'il est là ce soir. L'envie puérile de boire jusqu'à tout oublier, jusqu'à ne plus savoir marcher. Qu'on doive le secouer pour qu'il se casse, comme les ivrognes - ce qu'il est peut-être devenu, finalement. 
Va s'installer pas loin du bar. Préfère tourner le dos à tous ceux qui pourront bien lui cracher dessus, à c'dos. Dire qu'il est encore là à boire, dire qu'il va sans doute trouver avec qui rentrer ce soir. S'en fout, de ce qu'ils disent, Drake. Pas tant que ça, en vérité. 

La soirée s'annonce calme. Toujours les mêmes têtes de demeurées au tableau - la sienne en fait certainement parti. Barbe de trois jours, cheveux mal brossés, rien que sa gueule donne le ton de l'ambiance du bar. S'en fout, Drake. Se le répète à chaque gorgée, qu'il s'en fout. De tout. Et déjà la troisième pinte et il s'en fout encore plus de tout, l'marin. Puis enfin, y a de quoi s'amuser les rétines. Un vrai spectacle, on se croirait à un dîner-show. Il voit de plein fouet, Drake, l'homme qui dégobille directement sur le t-shirt de la dame. Peut pas retenir un rire discret, Drake. Elle garde son sang-froid, la dame. Lui, l'aurait déjà refait le portrait à ce saoulard. Bon, c'est qu'il est impulsif, aussi. Puis les sifflements et faut avouer, faut avouer hein, que Drake, il se gêne pas trop pour regarder, lui aussi. C'est animal, cet instinct stupide. Mais il se délecte, accoudé au bar comme au premier rang d'un concert. La demoiselle se retrouve vite en soutien-gorge. Loin de ne pas se satisfaire de la vue, Drake trouve qu'elle n'a pas froid aux yeux, celle-ci. Pourtant, quand l'gars d'à côté se met carrément à tendre la main pour espérer toucher quoi que ce soit alors qu'elle remet sa veste, Drake, ça le fait vriller.

Comme ça, on sait pas bien pourquoi ni comment ça déraille dans sa tête. Il s'est levé en un instant, a empoigné le gars par le col, le soulève un peu du sol. Tu voudrais pas que j'te coupe la main, mon gars ? Non ? Alors casse-toi d'ici. À peine relâché, le  à la moustache bien perverse d'ailleurs, s'enfuit à toutes jambes. Il pose son regard électrique sur la dame. Drake, c'est un séducteur, mais merde, y a des principes quand même. Se rapproche pas d'elle mais lui offre un soupir armé d'un sourire en coin. Les manières, ça s'enseigne pas pour tout le monde la même chose, je crois, qu'il lui envoie, avant de finir sa chope. La dépose sur le comptoir, fait le signe au barman pour en avoir une autre. Lui jette un regard vibrant. On vous en remet une aussi ? À mes frais. Désigne sa pinte, bien entamée.